
(Salt Lake City, Utah) Les équipes qui aspirent à des championnats travaillent toutes, cela va de soi, à réunir un maximum de conditions gagnantes pour arriver à leurs fins.
Mis à jour à 5 h 35
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Au hockey, par exemple, les directeurs généraux tentent de réunir la formation dirigée par le meilleur entraîneur appuyé par le meilleur personnel dans l’environnement le plus favorable…
Il n’en demeure pas moins que, comme la partie se joue ultimement sur la glace, c’est là, et pas ailleurs, que les hypothèses sous-jacentes à ces conditions gagnantes doivent être vérifiées et se lier les unes aux autres, à la manière des maillons d’une chaîne.
Personne n’a dit qu’il était absolument impossible que le Canadien connaisse des résultats positifs cette saison. Ce qui faisait varier le niveau d’optimisme des observateurs, c’était leur niveau de confiance en la capacité de cette équipe à remplir une série d’objectifs.
Voilà qu’après un peu plus d’une demi-saison, les hypothèses sont de plus en plus nombreuses à s’être concrétisées. La chaîne s’allonge. Et la victoire de 5-3 obtenue mardi soir en Utah en a fait la démonstration.
Après avoir terminé au 28e rang du classement général la saison dernière, la Flanelle devait forcément souhaiter un alignement des astres très précis pour grimper de manière significative. Dans l’ordre ou dans le désordre, et sans doute de manière non exhaustive, il fallait :
- Que Nick Suzuki soit un joueur d’un point par match ;
- Que Cole Caufield retrouve sa touche de marqueur ;
- Que Juraj Slafkovsky continue sur sa lancée ;
- Que Kirby Dach retrouve sa forme de 2022-2023 ;
- Que Patrik Laine retrouve le plaisir de jouer et sa capacité à marquer des buts ;
- Que les attaquants de soutien, surtout des vétérans, élèvent leur jeu ;
- Que Lane Hutson démontre qu’il est capable de jouer dans la LNH ;
- Que la hiérarchie en défense se stabilise ;
- Que Samuel Montembeault soit encore meilleur que l’an dernier.
C’était… beaucoup. Quelques-uns de ces souhaits de l’organisation se sont cochés d’eux-mêmes en début de campagne. D’autres restaient en suspens, et certains le sont encore. Néanmoins, ce qu’on a vu, au cours des dernières semaines, c’est une évidente accélération de la complétion de cette liste d’épicerie.
L’une des interrogations les plus névralgiques de cette énumération concernait Kirby Dach. Et la réponse commence enfin à se faire connaître.
Chimie
On en avait eu des indices pendant les Fêtes, mais ç’a été particulièrement éloquent en Utah : non seulement Kirby Dach sort de sa coquille, mais tout son trio, avec Patrik Laine et Alex Newhook, trouve ses repères.
PHOTO CHRIS NICOLL, USA TODAY SPORTS PAR REUTERS CON
Kirby Dach et Patrik Laine
Cette unité a été aussi mauvaise que le reste de l’équipe en première période. Mais au deuxième vingt, elle a trouvé ses ailes, inscrivant même deux des plus beaux buts de la saison. Celui de Laine, d’abord, qui a créé l’égalité à la suite d’un bel échange avec Alex Carrier et Alex Newhook. Celui de Dach, en suite, qui a laissé la défense des locaux être hypnotisée par Lane Hutson avant de lui-même mystifier tout le monde, y compris le gardien. Hutson, au fait, a encore été superbe, mais on trouvera bien le moyen de reparler de lui une autre fois.
À quelques heures du premier match de Laine avec le Canadien, le 3 décembre dernier, d’aucuns ont fourni cet avertissement : ce trio aura besoin de temps pour créer sa chimie. Un mois et demi plus tard, ce n’est pas encore la réincarnation de la Punch Line, mais l’amélioration est flagrante.
« Ça prend du temps, a encore dit Dach après la rencontre. Tu dois apprendre où se trouvent les gars, où ils aiment se trouver. Avec la vitesse et les habiletés de Newhook ainsi que l’intelligence et le tir de Laine, ça peut être une combinaison létale, mais il fallait trouver notre rythme. »
Un accomplissement encourageant, parmi tant d’autres : le premier but du Finlandais à cinq contre cinq, après en avoir inscrit neuf en avantage numérique. « On a fait des blagues avec ça au banc », a raconté Dach.
Newhook a lui aussi remarqué cette progression, et ce, en dépit de l’absence de Laine pendant quatre matchs au tournant de la nouvelle année. « Depuis son retour, on joue bien et on se lit bien, a analysé le numéro 15. Et je pense qu’on n’en donne pas trop à l’adversaire. On veut que ça continue comme ça. »
L’observation est juste. Au cours des premières semaines de son association, ce trio s’est souvent retrouvé dans l’embarras défensivement. Tout n’est pas réglé – Laine, surtout, a été horrible au premier vingt –, mais les signes sont résolument positifs.
Saluant leur « excellent match », leur entraîneur-chef a reconnu que cette combinaison revenait de loin et qu’elle n’a probablement pas encore touché à son plein potentiel.
« Je ne sais pas jusqu’où ils peuvent se rendre, mais c’est une belle progression, a résumé Martin St-Louis. C’est de ça dont on avait besoin de ce trio. On avait trois trios qui amenaient de la constance, mais celui-là était plus jeune [par rapport] au temps que [les joueurs] ont passé ensemble et des obstacles qu’ils ont vécus. Mais là, on voit qu’on a de la constance partout dans la formation. »
Si cette unité pouvait trouver son erre d’aller pour de bon, la banque d’hypothèses confirmées grossirait encore davantage. La chaîne, celle-là même qui a si souvent débarqué, se renforcirait.
Le reste de la campagne ne sera pas parfait et les résultats ne seront peut-être pas au rendez-vous de manière aussi soutenue que présentement. Mais quoi qu’il arrive, en fin de parcours, il faudra certainement se rappeler ces semaines déterminantes au cours desquelles on a vu se réunir les conditions gagnantes.
En hausse
Alexandre Carrier
Pour son fort match, mais aussi pour sa manœuvre sur le but de Patrik Laine, alors qu’il a laissé passer la rondelle entre ses patins à la manière de Mario Lemieux, en 2002, aux Jeux olympiques de… Salt Lake City. Venez nous dire que ce n’était pas scripté.
En baisse
Arber Xhekaj
Soirée difficile défensivement, surtout en première période. Les 10 minutes qu’il a passées au cachot pour inconduite ont contribué à limiter son temps de glace à 8 min 44 s.
Le chiffre du match
3
Mike Matheson, Patrik Laine et Kirby Dach, trois des quatre joueurs ayant été punis en première période, ont marqué dans cette rencontre. Une belle manière de se racheter.
PHOTO CHRIS NICOLL, USA TODAY SPORTS
Mike Matheson a déjoué le gardien du Utah Karel Vejmelka.
Dans le détail
Deux remplaçants pour Heineman
On savait déjà que Michael Pezzetta remplacerait Emil Heineman à cinq contre cinq, après que ce dernier se fut blessé dans un accident impliquant une voiture la veille. Mais l’absence du Suédois laissait aussi un poste à pourvoir sur la deuxième unité d’avantage numérique, et c’est Christian Dvorak qui a été l’heureux élu pour cette mission. Dvorak s’est fort bien débrouillé avec un homme en plus, et il est passé tout près de marquer en début de deuxième période. La durée de sa promotion sera probablement liée au sort de Pezzetta. Ce dernier, sur le quatrième trio, a été limité à cinq présences totalisant 3 min 50 s. C’est la troisième fois de suite qu’il joue moins de 4 minutes. Sa soirée s’était par ailleurs amorcée de la pire des façons avec une punition dès sa première apparition sur la glace. Si le Canadien devait rappeler un joueur du Rocket de Laval, par exemple Joshua Roy, on peut présumer qu’il prendrait la place d’Heineman dans toutes ses affectations.
Un coin précieux en moins
PHOTO SIMON-OLIVIER LORANGE, LA PRESSE
Photo prise depuis l’aire de travail des journalistes. Une mêlée le long de la bande était impossible à voir depuis notre position.
La vie nous donne parfois des leçons quand on ne s’y attend pas. Par exemple qu’on n’apprécie jamais autant les coins de patinoire que le jour où on ne les voit plus. Puisque le Delta Center, domicile du Club de hockey de l’Utah, a été conçu pour le basketball, de larges sections de sièges, principalement dans les hauteurs de l’amphithéâtre derrière les buts, offrent une vue partiellement obstruée aux partisans. Ces places sont donc offertes gratuitement ou pour quelques dollars. Or, d’excellents billets obligent aussi leurs occupants à étirer le cou et à faire l’impasse sur certaines séquences. Les journalistes ont eux aussi goûté à cette réalité. En l’absence de tribune de presse, les reporters ont été installés près de la glace, ce qui est inusité, mais assez agréable. Ce l’est moins, toutefois, lorsque l’action se déroule de manière répétée dans un coin de patinoire qui échappe complètement à notre champ de vision. Sur la photo qui coiffe ce paragraphe, les 10 patineurs sur la glace se chamaillent le long de la bande. Sauriez-vous le deviner ? Les descripteurs à la télévision et à la radio ont aussi été victimes de cette situation, qui constituait un handicap bien plus grave pour eux vu la nature de travail. Car on n’y pense pas tellement, mais il s’en passe, des choses, dans les coins de patinoire…
Foule enthousiaste, tradition bizarre
Les joueurs de l’Utah avaient prévenu que leurs nouveaux partisans étaient très enthousiastes et bruyants, et ils n’ont pas menti. L’ambiance n’était pas nécessairement à confondre avec une finale de la Coupe Stanley, mais c’était tout de même la fête dans l’amphithéâtre. Avant la rencontre, la présence de dizaines de chandails du Canadien dans les gradins laissait croire que les encouragements seraient divisés entre les deux clubs, mais finalement, les amateurs locaux ont eu largement le dessus. Cela étant, l’une de leurs traditions nous a laissés perplexes. À peu près systématiquement, dès que la caméra se braquait sur un spectateur et que celui-ci apparaissait sur l’écran géant, il calait sa bière au grand plaisir de la foule. Le phénomène a dû se reproduire au moins une dizaine de fois. Des enfants ont même calé ce que nous souhaitons être une boisson gazeuse. Dans un État qui impose des règles relativement strictes sur l’alcool, nous ne nous attendions pas à ça.


