La gestation des lapines, nous apprend le Centre hospitalier universitaire vétérinaire de l’Université de Montréal, dure de 30 à 33 jours, au terme de laquelle elle peut accoucher d’une portée de 4 à 12 lapereaux.
Publié à 19 h 21
Mais si la pauvre lapine pense que sa vie change vite en un mois, ce n’est toutefois rien en comparaison avec le Canadien. Oh que non.
Le 18 décembre, soit il y a un mois, le Canadien faisait l’acquisition du défenseur Alexandre Carrier, contre un autre arrière droitier, Justin Barron. Dur à dire si le Tricolore avait déjà pris son envol, mais l’équipe vient de connaître, et de loin, son meilleur mois sous la présente administration, avec une fiche de 10-2-1.
En soi, Carrier a excellé, avec une récolte de 7 points – tous à forces égales – en 13 sorties, un différentiel de +1 et une moyenne de 20 min 16 s par match.
Mais son arrivée a surtout permis de mettre en lumière un phénomène qui mérite une étude approfondie : plus le Canadien compte de défenseurs de leur côté naturel, mieux il se porte.
C’est qu’avec Carrier, Martin St-Louis peut compter, pour la première fois de la saison, sur deux défenseurs droitiers (l’autre étant David Savard) en qui il a confiance. Conséquemment, quand tout le monde est en santé, seul le gaucher Mike Matheson joue de son côté opposé. Kaiden Guhle, souvent employé à droite en début de saison, n’a pas amorcé de match sur le flanc droit depuis le 13 décembre. Seule la brève absence de Savard (quatre matchs) a forcé St-Louis à déployer une formation de cinq gauchers et un droitier.
« C’est dur, surtout pour les jeunes. On leur demande de changer de côté et quand tu apprends la position dans la meilleure ligue au monde, c’est parfois trop demander », avait reconnu Jeff Gorton, vice-président des opérations hockey, lors de l’acquisition de Carrier.
En jouant de son côté opposé, Guhle était pris dans des situations du genre, où sortir la rondelle du territoire défensif devenait hasardeux.
Les chiffres
Pour aller au fond des choses – y a-t-il une autre façon de faire ? – La Presse s’est offert un savant calcul de la fiche du CH en fonction de la présence de défenseurs droitiers.
Nous avons donc comptabilisé les minutes jouées par des arrières droitiers, afin d’en arriver à un ratio de minutes pendant lesquelles le Tricolore compte un arrière droitier sur la patinoire. Nous avons exclu du calcul le jeu en prolongation et les moments où le Canadien évolue en avantage numérique ; dans ces deux situations, le jeu défensif est complètement différent, sinon inexistant.
Prenons un exemple fictif. Dans un match de 60 minutes, Savard et Carrier ont chacun joué 20 minutes. C’est donc dire que pendant 67 % du temps (40 minutes sur 60), le CH comptait sur un défenseur droitier sur la patinoire.
Conclusion : quand le Tricolore compte sur un défenseur droitier pendant au moins 60 % des minutes, sa fiche s’améliore considérablement. Et c’est surtout grâce au jeu défensif.
En outre, la dernière défaite en 60 minutes du CH, lorsqu’un droitier est sur la patinoire au moins 60 % du temps, remonte au 31 octobre à Washington, le fameux match de la vomissure. Sa fiche dans les 12 derniers matchs où ce chiffre a été atteint : 10-0-2.
Il y a certes d’autres facteurs à considérer. Des matchs attribués à un Cayden Primeau chancelant, dans les deux premiers mois, reviennent maintenant à un Jakub Dobeš nettement plus assuré. Dobeš a remporté ses quatre départs jusqu’ici, tous dans le dernier mois.
PHOTO NICK WASS, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Jakub Dobeš
Sauf qu’avant même l’arrivée de Carrier, Montréal avait bien meilleure mine lorsque des droitiers jouaient plus souvent à droite. Dans les deux premiers mois de la saison, il est arrivé dans 12 matchs que le Canadien atteigne le chiffre de 60 % des minutes avec un droitier sur la patinoire. Sa fiche était de 6-5-1, bien meilleure que la fiche de 6-11-2 lorsque ce chiffre n’était pas atteint.
Mais en début de saison, les autres droitiers avaient pour noms Justin Barron et Logan Mailloux, des joueurs envers qui la confiance de St-Louis s’effritait de match en match.
Le désavantage numérique
Avec Carrier, St-Louis compte en outre sur deux droitiers employés en permanence en désavantage numérique. Barron et Mailloux étaient employés de façon sporadique dans cet aspect du jeu, avec comme résultat que le Tricolore se retrouvait parfois avec deux gauchers pour défendre l’enclave, ce qui menait à des jeux comme celui-ci.
Avant la transaction du 18 décembre, le CH faisait tout de même belle figure à court d’un homme, avec un rendement de 81,1 %. Mais il y avait un défenseur droitier sur la patinoire seulement les deux tiers du temps (126 minutes sur 186).
Depuis l’arrivée de Carrier, on retrouve un arrière droitier presque en tout temps (62 minutes sur 70). Et le rendement du CH a grimpé à 86,1 %.
L’arrivée de Carrier à elle seule n’explique pas tout. Ce n’est pas parce qu’il joue plus souvent avec un défenseur droitier que Kirby Dach s’est remis à marquer, que Juraj Slafkovsky a retrouvé peu à peu son aplomb de l’an passé, que Lane Hutson – qui évolue d’ailleurs avec l’unique gaucher à droite – continue d’épater la galerie.
N’empêche que de tous les facteurs de succès, on ne saurait ignorer le fait que les joueurs occupent un rôle qui leur sied. Et ça inclut de quel côté de la glace ils patinent.