Samuel Montembeault en avait gros sur le cœur.
Mis à jour hier à 23 h 52
Même si les gardiens, et tous les joueurs de la ligue, en fait, parlent constamment de l’importance d’avoir la mémoire courte, la défaite contre les Maple Leafs de Toronto, samedi dernier, lui était restée en travers de la gorge. La défaite elle-même, évidemment, mais encore davantage les quatre buts qu’il a accordés en troisième période.
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Toute l’équipe a pu se racheter moins de 24 heures plus tard contre les Rangers de New York. Mais pas lui. Alternance oblige en raison des deux matchs en deux soirs, il a regardé son adjoint Jakub Dobes l’emporter en prolongation.
Mardi, avant d’affronter le Lightning de Tampa Bay, Montembeault avait averti ses coéquipiers qu’il leur en devait une. Ceux-ci n’étaient pas d’accord avec lui. « Il a été bon pour nous toute l’année », a argué Alex Newhook. « Je ne pense vraiment pas qu’il a été aussi mauvais qu’il le dit. Il exige beaucoup de lui-même », a abondé Jake Evans.
C’était quand même le sentiment qui habitait le gardien de 28 ans. Il en devait une « aux gars et aux partisans », précisera-t-il lui-même en fin de soirée. Il leur a promis qu’il serait à la hauteur.
Peu importe le regard que l’on porte sur son départ précédent, il pourra dire qu’il a tenu sa promesse. Comme Ovila Pronovost dans la scène finale de Blanche. Car sa sortie de mardi a été spectaculaire.
Bien que le Lightning ait marqué les deux premiers buts du match, la prestation de Montembeault a été l’une des principales raisons derrière la remontée du Tricolore et sa victoire de 3-2 au Centre Bell. Car les visiteurs ont largement dominé la première et, surtout, la troisième période.
Au cours des cinq dernières minutes de la rencontre, Nikita Kucherov, de l’enclave, et Michael Eyssimont, sur un retour de lancer, se sont vu offrir des occasions en or de donner l’avance aux Floridiens. Chaque fois, le gardien du CH s’est dressé.
Le décompte des chances de marquer de qualité n’est pas une science exacte ni parfaite. À cinq contre cinq, le site Natural Stat Trick a néanmoins établi l’avantage du Lightning à 18-3 dans cette rencontre. Ce qui est assez représentatif de l’allure de la soirée.
« Il nous a gardés dans le match, il nous a donné une chance », a constaté Martin St-Louis.
Quand les patineurs n’offrent pas leur meilleure performance, « ton gardien peut t’aider beaucoup », a poursuivi l’entraîneur-chef. « C’est ce qu’il a fait ce soir. »
Pas mirobolant
En réalité, St-Louis a dit que son équipe n’avait pas déployé sa « A game », expression difficilement traduisible en français, mais qui désigne la meilleure version du club, un soir donné.
Le fait est toutefois que Samuel Montembeault, depuis que le Canadien ne sait plus comment perdre, n’a pas chaque soir affiché sa « A game ».
Comprenons-nous bien : il ne tire pas son club vers le bas. Depuis le 16 décembre, sa fiche est de 8-3-1. Dans toute la LNH, seulement trois gardiens ont davantage de victoires dans l’intervalle (9).
Ses statistiques individuelles, cependant, ne sont pas mirobolantes. Un taux d’arrêts de ,897 toutes situations de jeu confondues et de ,891 à cinq contre cinq au cours du dernier mois. Dans cette dernière catégorie, il est parmi les derniers du circuit. En outre, sa performance face au Lightning, mardi, a rapproché de zéro son indice de buts sauvés ou accordés en trop. C’est une bonne nouvelle, car il était jusque-là en déficit.
Insistons : il a été un artisan évident de la remontée du CH au classement. Contre les Stars de Dallas, il y a une dizaine de jours, le match ne se serait jamais rendu en prolongation sans son brio. Et pendant les Fêtes, il a signé deux gains en arrêtant 48 des 52 tirs du Lightning (décidément !) et des Golden Knights de Vegas. Mais d’autres soirs, à domicile contre les Canucks de Vancouver puis sur la route en Utah, il a semblé légèrement moins en maîtrise de la situation.
Quand on aborde le sujet avec Montembeault, il ne s’en formalise pas le moins du monde.
Souvent, on accorde moins de lancers, alors si je donne trois buts, je peux avoir disputé un bon match, mais mon taux d’arrêts sera inférieur à ,900. C’est important de trouver une façon de gagner des matchs et de faire comme on a fait ce soir en gardant l’avance quand on est allés la chercher.
Samuel Montembault
Et de répéter : « C’est ça, le plus important. »
Tout Samuel Montembeault pourrait à peu près se résumer dans cette proposition. Pour différentes raisons qui ne sont pas toutes de son ressort – pensons par exemple à la qualité de l’effectif autour de lui –, il n’est pas dans la discussion lorsque les plus grands noms de sa profession sont prononcés. Or, quand on y pense, il n’est jamais réellement inférieur à son équipe. Même dans les quelques matchs qu’il n’a pas terminés cette saison, c’est le club en entier qui s’embourbait.
Depuis trois ans, il tire bien plus souvent ses coéquipiers vers le haut que l’inverse. Et c’est encore ce qui s’est produit mardi.
Alors même lorsque Montembeault considère qu’il leur en doit une, ils ont raison de lui dire que ce n’est pas le cas. Parce qu’il a souvent fait la preuve qu’il est l’homme de la situation.
En plus, contre le Lightning, il l’a fait sous les yeux de l’entraîneur Jon Cooper et du directeur général Julien BriseBois, tous deux impliqués dans l’équipe canadienne en vue de la Confrontation des 4 nations.
On pourrait penser à un pire moment, disons.
En hausse : Joel Armia
Il a été l’attaquant le plus utilisé de son club en désavantage numérique, contre l’un des bons avantages numériques de la ligue de surcroît. Sa passe était parfaite sur le but gagnant.
En baisse : Josh Anderson
La blessure au genou qu’il a semblé subir dimanche dernier l’incommode-t-il ? Il a peiné dans un match qui a monté en intensité de période en période, pourtant un contexte favorable pour lui.
Le chiffre du match : 9
Lane Hutson a obtenu une mention d’aide dans un neuvième match de suite, égalant le record de la LNH pour un défenseur recrue établi par Shayne Gostisbehere en 2015-2016.
Dans le détail
Le retour de Slafkovsky
Pendant 10 matchs, entre le 23 décembre et le 14 janvier, Juraj Slafkovsky n’avait inscrit aucun but. Cependant, il a touché la cible trois fois lors des quatre dernières rencontres. Mardi soir, il a inscrit son équipe au pointage grâce à un but en avantage numérique. La rondelle s’est faufilée entre le patin et le bloqueur du gardien Andrei Vasilevskiy. Un trou aussi petit qu’un nid de colibri. Pourtant, le joueur de 20 ans a trouvé l’espace suffisamment large pour tenter sa chance. « Je voulais juste tirer au but en espérant que ça entre », a-t-il précisé après la rencontre. Slafkovsky a été de tous les combats contre le Lightning. Il a été le deuxième parmi les attaquants les plus utilisés par Martin St-Louis et a conclu sa soirée de travail avec un but, quatre tirs et trois mises en échec. « J’étais tanné de mal jouer. Quand je regardais les matchs, je me trouvais horrible », a expliqué Slafkovsky à propos de sa récente séquence sans marquer. Depuis quatre matchs, « je suis plus engagé, je touche à plus de rondelles et je prends de meilleures décisions », a-t-il ajouté.
Laine, le passeur
Patrik Laine fait parler de lui grâce à son tir foudroyant et à sa capacité à marquer lors de moments importants depuis son arrivée à Montréal. Or, contre le Lightning, il s’est démarqué en alimentant ses coéquipiers. Personne ne prétend avoir vu la réincarnation de Joe Thornton au Centre Bell, mais cette dimension pourrait sans doute aider le Canadien dans un avenir plus ou moins proche. En avantage numérique, Laine a attiré deux joueurs adverses avant de remettre la rondelle à Slafkovsky, le premier marqueur de la rencontre. Moins de deux minutes plus tard, le Finlandais a repéré Alex Newhook vis-à-vis du haut des cercles pour permettre à son compagnon de trio de créer l’égalité. Avant la rencontre, seulement trois des 15 points de Laine étaient des mentions d’aide. C’est aussi la première fois depuis le 21 mars 2023 qu’il récoltait deux aides dans un même match.
Les largesses de Dach au centre
Sans nécessairement nuire au travail de ses coéquipiers et au rendement de son équipe, Kirby Dach n’a pas non plus été d’une grande aide. Surtout au cercle des mises en jeu. Le joueur de centre a gagné une seule de ses quatre mises en jeu. En début de deuxième période, Dach a perdu son duel en zone défensive face à Brayden Point. Michael Eyssimont s’est emparé de la rondelle derrière le joueur du Canadien avant de remettre devant le filet à Jake Guentzel, qui a marqué le deuxième but des siens. Et les ennuis de Dach dans cette phase précise du jeu ne datent pas d’hier. Chez les cinq joueurs ayant joué régulièrement au centre cette saison, il affiche le pire ratio avec un taux d’efficacité de 38,0 %. Sur ce trio, le meilleur joueur pour gagner des mises en jeu est Alex Newhook, avec un taux de réussite de 43,3 %. Et Martin St-Louis doit être au courant des difficultés de Dach, car il est le joueur de centre le moins utilisé dans sa zone. Mardi soir, il a pris sa 46e mise en jeu en territoire défensif. À titre comparatif, dans cette situation, Jake Evans a été envoyé dans la mêlée 334 fois, un sommet chez le Tricolore.