Le Québec, terre de foot. Ce constat, on le dresse de plus en plus grâce aux joueurs et joueuses de soccer qui émergent et excellent un peu partout. Mais on se rend graduellement compte qu’il en vaut autant pour les entraîneurs.
Publié à 7 h 00
Les exemples sont nombreux. Wilfried Nancy en est le chef de file, actuellement : le Français a passé près de 20 ans à parfaire son curriculum au Québec, avant d’être nommé entraîneur-chef de l’année avec le Crew de Columbus en MLS, le plus haut circuit nord-américain, la semaine dernière.
Maintenant, plus près de chez nous, les Roses de Montréal viennent d’annoncer un personnel technique entièrement composé d’entraîneurs ayant fait leurs classes dans la Belle Province.
En septembre, l’équipe a nommé Robert Rositoiu au poste d’entraîneur-chef. Rositoiu est un Montréalais de 31 ans originaire de la Roumanie. Il a mis le pied dans la pré-Académie de l’Impact de Montréal dans sa vingtaine.
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Mercredi dernier, les Roses ont nommé ses trois adjoints.
Maryse Bard-Martel, de Boisbriand, sera la première adjointe à l’entraîneur-chef. L’ancienne geôlière occupera également le poste d’entraîneuse des gardiennes.
Yannick Girard, jusqu’à tout récemment préparateur physique à Canada Soccer et anciennement à l’Impact, sera responsable de la performance de l’équipe.
Antoine Guldner, qui a longtemps travaillé avec le CF Montréal, est depuis le 1er octobre le préparateur mental et responsable de la culture de performance du nouveau club professionnel de soccer féminin.
Girard et Guldner sont deux Français qui, comme Nancy, ont fait du Québec et du Canada leur terre d’accueil. Les deux travaillaient pour le Bleu-blanc-noir lorsque l’Académie de l’Impact est née, et ils étaient « émus » lorsque les Roses ont annoncé leur image de marque, en octobre dernier.
« On est des Québécois d’adoption », dit Guldner à La Presse dans le cadre d’un entretien en marge des journées de détection de joueuses pour les Roses, la semaine dernière, au centre d’entraînement de Bois-de-Boulogne, à Laval.
« Mais je pense que lui et moi, on s’est pris de passion pour développer le foot ici. On a vu le potentiel qu’il y avait, grâce à la diversité, grâce aux talents des Québécois. Sincèrement, ça me tient à cœur de participer à ce projet-là de manière générale, filles et garçons. »
Être impliqué dans la naissance de l’équipe professionnelle féminine à Montréal, franchement, c’est beau. C’est magnifique.
Antoine Guldner
Le soccer féminin sera une « découverte » pour Guldner. Ce le sera un peu moins pour Girard, assis au côté de son collègue devant l’un des terrains synthétiques de Bois-de-Boulogne.
« J’ai eu la chance de travailler avec des équipes féminines, et voir ce qu’il manquait, les occasions qu’elles n’avaient pas, explique Girard. C’est un milieu dont je savais qu’il fallait qu’il se développe. »
Bard-Martel le sait trop bien. Après avoir été gardienne dans les programmes nationaux de Canada Soccer jusqu’en 2013, elle a dû s’exiler aux États-Unis, dans la NCAA notamment, pour poursuivre son parcours. Comme la grande majorité des Canadiennes souhaitant vivre de leur soccer… avant l’arrivée de la Super Ligue du Nord (SLN).
PHOTO PABLO ORTIZ, FOURNIE PAR LES ROSES DE MONTRÉAL
Maryse Bard-Martel, première adjointe à l’entraîneur-chef des Roses de Montréal
« Le timing était bon, j’étais à la recherche d’un nouveau projet, soumet-elle dans une entrevue téléphonique avec La Presse. Ça faisait longtemps que l’un de mes rêves était de revenir à la maison. En voyant l’ampleur et les valeurs du projet, il y a eu de l’intérêt des deux côtés. »
« Maryse a dû quitter le Québec parce qu’il n’y avait rien pour elle, illustre Antoine Guldner. Et elle revient en tant qu’adjointe principale. C’est une très belle histoire. »
« Elle va avoir un rôle crucial »
Au cours d’une longue entrevue de La Presse en septembre, Rositoiu a fait valoir qu’il avait été « clair avec les propriétaires » : il veut aider à construire une relève, qui sera constituée de « femmes québécoises ».
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« Pourquoi ne pas former quelqu’un qui éventuellement prendra ma place ? avait-il lancé. Je veux vraiment participer à ça. Les femmes m’ont énormément apporté. Aujourd’hui, d’avoir cette responsabilité-là, c’est un privilège pour moi. »
Bard-Martel pourrait-elle être cette personne ? « Oui, 100 %, confirme Rositoiu. Elle a le potentiel. À savoir si elle a l’envie… vous lui poserez la question ! »
Une chance que nous parlons à la principale intéressée après coup.
« Je suis là où sont mes pieds, image Bard-Martel. Je ne veux pas trop penser à des choses comme ça, dans l’avenir. Je veux faire un bon travail avec Robert en ce moment, m’améliorer chaque jour, et aider Robert à s’améliorer. Après ça, les choses vont tomber comme elles sont censées tomber. »
Les deux ont déjà eu un « débat » constructif, lors du processus d’embauche, sur la meilleure façon d’utiliser la gardienne en sortie de zone défensive.
« On construisait sur une idée, raconte Rositoiu. Là, on a senti qu’on avait envie de travailler ensemble, parce qu’on se rejoignait. »
« Elle a une super expérience, renchérit Guldner. Elle a tout vécu en tant que joueuse, elle a une vision spécifique en termes de soccer universitaire et canadien. […] Elle va avoir un rôle crucial. »